Le Kamerun vient de passer médiocrement un autre test de la démocratie. Depuis les élections sénatoriales de juin 2013 où il n´y a vraiment pas eu de mouvement remarquable du fait que le RDPC parti au pouvoir depuis 31 ans était candidat majoritaire, avec à la clef la nomination par le Chef de l’Etat de 30% des sénateurs ainsi que le veut la loi, l’on se serait attendu à une certaine mobilisation pour le double scrutin du 30 septembre dernier.
Malheureusement, malgré l´introduction de la biométrie que l´on espérait salvatrice et réel moyen de lutter contre la fraude, l´observateur vigilant est bien contraint d’émettre des réserves. Le kamerun a encore un long chemin à faire pour qu´on parvienne à parler de démocratie et de transparence.
Entre le président du CNC (Conseil National de la Communication) qui interdit la publication des tendances des scrutins en passant par le ministre de la communication qui musèle les chaînes de télé et radio et les contraint à suspendre les programmes politiques les plus suivis, le kamerunais lambda s´est complètement perdu dans cette cacophonie.
Comment peut-on de manière si flagrante violer la loi fondamentale d´un pays sans que le citoyen ne riposte? Encore que tous les journalistes n´ont pas respecté cette interdiction arbitraire car certains ont timidement mais sûrement publié les tendances.
Désorganisation
Le manque d´organisation communicationnelle et de programmes politiques était la chose la plus palpable dans toutes les formations politiques. Triste réalité, on avait l‘impression que l´on attendait les élections sans les préparer et qu´on a été pris de court.
Les kamerunais utilisant déjà très peu les médias en ligne, même Facebook média non répertorié au Kamerun n’a pas échappé à la constipation occasionnée par cette interdiction. Ce mode rusé d‘intimidation a pesé de tout son poids pendant la première semaine du scrutin et la peur était perceptible lorsqu´on demandait à un ami journaliste ou même aux differents candidats de partager les tendances. Nous devons à cet effet reconnaître si ne n’est pas déjà le cas que la force du régime en place est d´avoir réussi à installer une peur aliénante dans les esprits des kamerunais qui obéissent désormais à toute interdiction même celle en violation de la loi comme une lettre à la poste.
Au départ, la campagne électorale est embastillée dans le pagne d´une kamerunaise spéciale pour masquer les manquements des investitures au sein du parti-Etat, le tripatouillage des listes de ce parti après dépôt et clôture des dossiers à Elecam et la disqualification abusive des listes de certains formations politiques.
Une curieuse disqualification
Mon attention a été particulièrement retenue par la disqualification des listes du PURS à Yaoundé 5ème pour les municipales et dans la Mefou-et-Akono pour les législatives. Pour la simple raison que ces listes étaient portées par un politique dont je scrute le parcours avec beaucoup d´intérêt comme de nombreux kamerunais d´ailleurs.
Oui, les listes portées par le Dr. Vincent-Sosthène Fouda du Mouvement Camerounais pour la Social-Démocratie (MCPSD), qui a accepté de faire alliance et de se mettre dans la mouvance de la Convergence des forces pures de Serges Espoir Matomba sous le label „la Convergence“ ont toutes été disqualifiées sans ménagement malgré une plaidoirie conséquente à la cours suprême faisant office de cours constitutionnelle pour la cause. Cette disqualification n´est pas passée inaperçue au sein de la communauté politique même si l´on a pas eu le temps d´en parler ouvertement eu égard de la course contre la montre engendrée par des délais trop courts entre la convocation du corps électoral, la campagne électorale officielle et les élections proprement dites. Il serait donc nécessaire de revenir un temps soit peu sur cette disqualification.
Adulé par la jeunesse, admiré par ses sympathisants comme par ses adversaires, copié par des esprits rusés cet homme représente-t-il une menace pour le parti au pouvoir qui ne cesse de le torturer moralement?
Mais qui avait intérêt à recaler Vincent-Sosthène Fouda à Yaoundé 5ème son village et son fief politique, qui avait intérêt à recaler sa liste dans la Mefou-et-Akono?
En distrayant certains documents des dossiers complets dûment déposés par „ la Convergence“ pour ces circonscriptions les décideurs ont une fois de plus fait montre d’une lâcheté politique légendaire dont ils sont les seuls à en connaître le secret dans ce pays nôtre. Il apparaît donc clairement que ce rejet visait à empêcher Vincent-Sosthène Fouda à concourir là où l´électorat lui était acquis...
On se rappelle que pendant la présidentielle de 2011 on a disqualifié sa candidature en prétextant qu‘il n´était pas kamerunais. Au double du 30 septembre dernier, on a distrait certains documents afin de déclarer incomplets les dossiers de sa liste et la disqualifier.
Pendant ce double scrutin, nous pouvons cependant noter un changement certain qui nous permet d´espérer que la prochaine fois sera la bonne, puisqu´on lui a permis de déposer les dossiers où il était candidat avant de les rejeter sous prétexte qu’ils sont incomplets. Cela signifie donc qu‘on le reconnaît désormais kamerunais et que tous les doutes sur sa nationalité sont levés. De plus, il a pu voter comme tout kamerunais régulièrement inscrit sur les listes électorales. Oui, ceci est une avancée pour cet homme politique à qui un avenir politique certain est destiné s´il continue d´arrache pieds de se battre contre le système en place et garde sa posture de défenseur des droits des sans-voix et d´homme incorruptible, constant et cohérant malgré les harcèlements et les intimidations dont il fait l´objet car la politique c’est accepter de labourer le terrain, d’être au contact du peuple.
Elections bricolées sans électeurs
Nous avons vu une campagne sans citoyens avec en prime du folklore Rdpéciste couronné de distribution de quelques bonbons et joujous. C’était aussi des élections sans électeur seulement près de 5 (cinq) millions d´inscrits alors que l‘objectif était de 8 (huit) millions pour Elecam et par dessus tout un colis de fraudes, de votes fantômes, des achats de voix devant les bureaux de votes, des intimidations, etc..
Si nous étions un pays d´hommes et de femmes vigilantes, nous pourrions tirer de nombreuses leçons. Si nous étions un pays où le citoyen l’est et le demeure partout où il se trouve sur le territoire national, nous devrions beaucoup apprendre de ces élections...car malgré la toute puissance du parti au pouvoir et sa connivence avec Elecam et la cours suprême, des nouveaux partis politiques ont pu voir leurs candidats s’installés dans des mairies et à l’assemblée nationale changeant ainsi la carte politique kamerunaise et ouvrant un espoir certain quant au futur politique de notre pays.
Voilà, de nouveaux mandats commencent à l´assemblée nationale comme dans les 360 communes du pays. Les populations aux prises avec la misère institutionnalisée vont-elles continuer à ne voir leurs élites que pendant les campagnes électorales? Ce sont ces élites qui considèrent les populations comme du bétail électoral qui ont été sanctionnées durant ce double scrutin. Il serait intéressant de ne point l’oublier.
Réel engagement politique et citoyen
Il y a certes de nouveaux visages que l´on espère voir faire la différence sur le terrain. Mais la question se pose déjà de savoir ce que les kamerunais pourraient faire pour que ceux qu‘ils ont élus fassent leur travail de manière transparente et bénéfique pour les peuples du Kamerun et la Nation entière.
Car il ne suffit pas de voter, il faut aussi savoir demander des comptes à ceux-là à qui on a donné autorité de gérer nos destinés. Nous devrions donc avoir les yeux partout pendant ce mandat. Pourquoi pas documenter nos communes du début à la fin cette mandature afin de pouvoir à la fin de celle-ci mettre à la connaissance de tous l´évolution voire l‘amélioration s‘il y en a eu mais surtout ne devrions-nous pas aller vers les élus pendant leur mandat non pas pour demander de l‘aide mais pour connaître le fonctionnement de la mairie, les projets, les recettes et tout autre élément servant à la gestion de la commune?
Oui, j´invite chaque kamerunais à le faire dans sa commune de résidence. Ne croisons plus les bras pour attendre les résultats, forçons nos élus à travailler et à mettre les informations à la portée de chaque citoyen.
Aux recalés ou à ceux qui n´ont pas pu gagner des voix leur permettant soit de siéger au conseil communal soit à l´assemblée nationale, je dis rien n´est perdu et le temps passe vite. Faut se remettre au travail. Le plus important étant l´éducation et la formation du citoyen sur la chose publique et électorale essentielles à l´instauration de l´esprit démocratique et citoyen. Chaque kamerunais pendant les 5 (cinq) prochaines années doit pouvoir prendre conscience que voter est non seulement un droit fondamental mais aussi un devoir citoyen car nos communes sont les reflets des hommes qu´on y met et celui de notre engagement en tant que citoyen.
Les politiques et les citoyens ont donc de quoi user leurs souliers sur le terrain car il serait fatidique d‘attendre l´année butoire pour essayer de parcourir le Kamerun et travailler avec les populations. C'est maintenant que tout se prépare face un adversaire „goliatement“ installé.